Navigations autour de l’Atlantique

L’AJD – association des Amis du Jeudi Dimanche, a été créée en 1951 par le Père Michel Jaouen pour élargir l’horizon de jeunes délinquants.
En 1968, Michel Jaouen fait l’acquisition du Bel Espoir II (goélette 3 mats) et embarque à son bord des jeunes sortants de prison. Convaincu que le mélange des gens est la meilleure recette, le Père Jaouen ouvre rapidement les portes : tout le monde peut embarquer : jeunes en difficulté de plus de 18 ans, ou groupe de mineurs accompagnés, individuels, familles, retraités…

Michel Jaouen
Le Bel Espoir II
Le Rara Avis

Suite au succès des premières transatlantiques avec le Bel Espoir II, en 1973 l’association fait l’acquisition d’un deuxième grand voilier : le Rara Avis.

En 1992 le Bel Espoir II arrive en bout de course. Une première grande rénovation est lancée à Camaret, l’occasion pour l’AJD de découvrir que l’activité de rénovation de navire est aussi un excellent outil pour servir sa cause, la réinsertion de personnes en difficultés.

En 2000, c’est au tour du Rara Avis de subir une grande rénovation. Cette fois, ça sera dans un atelier de l’AJD, créé pour l’occasion. Depuis, la base navale du « Moulin de l’Enfer » située dans un petit bras secondaire de l’Aber Wrac’h accueille de nombreux navires et stagiaires. Le Bel Espoir II y réalise sa deuxième grande rénovation entre 2017 et 2023.

Base navale de l’AJD, le Bel Espoir est là !

Aujourd’hui, les activités de l’AJD sont réparties entre

  • les deux grands voiliers qui naviguent chaque année autour de l’Atlantique
  • toute une flottille de plus petit bateaux (de la simple plate au voilier de 20m) qui font toutes sortes de navigations – que ce soit localement à la journée ou sur de plus grands voyages en France et Europe
  • et le chantier qui, tout en assurant l’entretien de toutes ces unités est une excellente école des métiers techniques de la mer.

Juste après mon hivernage aux îles Kerguelen, j’ai rejoint le Bel Espoir II aux Antilles. Le trajet classique du bateau ressemble au schéma ci-contre. Habituellement les équipiers qui font le tour complet embarquent depuis la France.

Dans mon cas en arrivant aux Antilles j’ai découpé mon tour différemment, ce qui fait que les 6 premiers mois, sur le trajet Antilles ➡︎ Canada ➡︎ France l’équipage en place a pu m’apprendre à naviguer, puis les 6 mois suivants sur l’autre trajet France ➡︎ Antilles c’était à mon tour d’apprendre aux autres à naviguer.

« L’AJD c’est l’école de la vie, l’école de la débrouille et l’école de la mer. »

Ecole de la vie

A tous points de vue. A bord des navires, on retrouve tous types de personnes : vacanciers, jeunes en difficulté, étudiants en marine marchande, retraités etc. Tout le monde participe à la manœuvre et à la vie du bord. Impossible de se cacher très longtemps quand on est en mer !

Ainsi, les personnes qui étaient marginalisées ou en décrochage social se retrouvent au même niveau que tout le monde dans une micro-société. C’est ce qui leur permet de reprendre pied.

Également, les personnes dites « normales » se trouvent confrontées à des personnes aux profils très différents d’eux, ou issues de milieux sociaux qu’ils n’ont pas l’habitude de fréquenter. L’occasion d’apprendre à vivre ensemble, au sens large du terme.

Le voyage est aussi en soi une « école de la vie ». La vie à Saint Domingue n’est pas la même qu’en Norvège, au Canada ou à Madère. Pour ceux qui n’ont pas eu la chance de partir à l’étranger au cours de leur vie, se retrouver à bord des navires de l’AJD c’est l’occasion de s’ouvrir à d’autres cultures, lieux , paysages, modes de vie.

Cap Vert
Saint Vincent (Grenadines)
Cuba
Terre Neuve

Ecole de la mer

Depuis la manœuvre des voiles jusqu’à l’entretien de la machine en passant par la cuisine et la lecture des cartes, les sujets d’apprentissages sont nombreux. Pour que les navires arrivent à destination, tout le monde doit y mettre du sien, partager son savoir et ses expériences, apprendre des autres. Il arrive qu’un nouveau stagiaire finisse par devenir commandant des grands navires !

Au chantier, les stagiaires peuvent toucher à tous les métiers techniques de la mer : charpente marine, menuiserie, électricité, ferronnerie, mécanique etc.

École de la débrouille

En milieu isolé – aux îles Kerguelen comme en mer – il faut savoir faire avec ce que l’on a. Pas question de compter sur un livreur qui viendrait vous apporter la pièce qui manque. Mais à l’AJD la débrouille c’est plus que ça, c’est une institution. On apprend à faire avec ce qu’on a, à réutiliser ce qu’on trouve, à ne pas gaspiller, et à s’en sortir en toutes circonstances !

Avec mon ami Felix nous avons dû de refaire le bobinage d’un groupe électrogène à la main, celui-ci ayant rendu l’âme en pleine navigation. Sacré affaire qui nous a pris toute la nuit ! Le groupe a ensuite repris du service pendant de longs mois, jusqu’à notre retour à l’Aber Wrac’h ou nous avons pu le changer.

Souvenir de l’époque où j’étais pirate. Le perroquet sur mon épaule était encore tout jeune.

Note : certaines photos sont tirées du site www.belespoir.com et appartiennent à l’AJD. Les autres sont les miennes.